Mise en contexte
L’interconnexion des éléments économiques peut souvent créer un effet domino, où une petite perturbation dans un secteur peut déclencher un raz-de-marée dans un autre. Cela est particulièrement observé dans la relation entre l’inflation et la pauvreté.
Des événements récents au Ghana fournissent une illustration frappante de ce phénomène. Le pays, célébré pour avoir réduit son taux de pauvreté de plus de la moitié, passant de 52,6 % en 1991 à 21,4 % en 2012, a été confronté à des défis économiques de premiers ordres.
La 7e mise à jour économique de la Banque mondiale sur le Ghana a révélé qu’une hausse inattendue des prix en 2022 a replongé près de 850 000 Ghanéens dans la pauvreté, annulant ainsi des années de progrès économique.
Comprendre l’inflation
L’inflation fait référence au taux auquel le niveau général des prix des biens et services augmente. Elle diminue le pouvoir d’achat, chaque unité de monnaie achète moins de biens et de services.
L’inflation est quantifiée en tant qu’augmentation en pourcentage annuel, et à mesure que le taux d’inflation augmente, le pouvoir d’achat de la monnaie diminue. Les mesures les plus courantes de l’inflation sont l’Indice des Prix à la Consommation (IPC) et l’Indice des prix de gros (IPG).
L’inflation a un impact direct sur l’économie. Une inflation modérée est attendue dans une économie en croissance. Cependant, une inflation élevée peut être nuisible, créant de l’incertitude et décourageant l’investissement et l’épargne.
À des niveaux très élevés, l’inflation peut gravement perturber l’ordre économique et social, comme on l’a vu dans des scénarios d’hyperinflation comme celui du Zimbabwe à la fin des années 2000.
La situation au Ghana
Les récents problèmes économiques du Ghana peuvent être attribués à divers facteurs. Le rapport de la Banque mondiale pointe une augmentation des prix tout au long de l’année 2022, entraînant une perte de pouvoir d’achat moyen de 15,7 %.
Cette situation a été ressentie à tous les niveaux de revenu, les 20 % les plus pauvres de la population perdant 16,1 % de leur pouvoir d’achat et les 20 % les plus riches perdant 15,5 %. Tout le monde l’a ressenti à travers le pays. Notamment, ces pertes se sont intensifiées vers la fin de l’année à mesure que l’inflation augmentait.
Une contribution substantielle à cette situation inflationniste provient du secteur de l’énergie du Ghana. Des défis tels que la sous-tarification de l’électricité, les mauvaises performances des entreprises de distribution, et les contrats excessifs de production et d’approvisionnement en gaz ont conduit à une accumulation d’arriérés sectoriels s’élevant à environ 2,3 milliards de dollars à la fin de 2022.
Sans action corrective, ces arriérés pourraient dépasser 8 milliards de dollars d’ici 2025. Même avec la tentative du gouvernement d’augmenter les tarifs de l’électricité, la dépréciation du taux de change a érodé les gains, car la plupart des coûts de production sont en dollars américains. Il faut comprendre que la lutte contre l’inflation au Ghana est une bataille difficile.
Lien entre inflation et pauvreté
L’effet de l’inflation sur la pauvreté est multiple. Premièrement, l’inflation peut entraîner une stagnation des salaires. Au Ghana, le salaire minimum n’a augmenté que de 10 % en 2022, alors que les prix généraux ont augmenté de plus de 53 %, ce qui signifie que les revenus réels des travailleurs ont diminué de plus de 43 %.
Cette disparité implique que les revenus ne peuvent pas suivre le coût croissant de la vie, poussant les gens vers la pauvreté ou les y enfonçant davantage.
Toute augmentation des prix peut être significative pour les ménages à faible revenu qui tirent déjà le maximum de chaque Cédi, la monnaie du Ghana. Pour info, 1 Cédi est égal 0,080€. La hausse des coûts peut forcer les familles à renoncer à des dépenses nécessaires, comme les soins de santé ou l’éducation, perpétuant ainsi un cycle de pauvreté.
Beaucoup de gens, en particulier ceux vivant dans la pauvreté, n’ont pas le luxe d’investir dans des actifs protégés contre l’inflation. S’ils en ont, leurs économies sont souvent en espèces ou en actifs équivalents en espèces dont la valeur est érodée par l’inflation.
Ce problème a été mis en évidence au Ghana, où l’inflation croissante a amené les ménages à épuiser leurs économies ou à vendre des actifs pour répondre à leurs besoins.
Les répercussions de l’inflation ne se limitent pas aux ménages individuels mais s’étendent au niveau macroéconomique, perturbant l’équilibre économique. Pour le Ghana, la flambée de l’inflation en 2022 a porté un coup à la croissance économique du pays et a amplifié les vulnérabilités fiscales existantes.
Pour atténuer les effets de l’inflation et de la pauvreté, plusieurs mesures peuvent être prises. Le rapport de la Banque mondiale suggère que le Ghana doit se concentrer sur la réduction des coûts de production, en particulier dans le secteur de l’énergie, et sur l’amélioration de la productivité.
De plus, des politiques sociales ciblées, telles que des programmes de transfert d’argent conditionnels, peuvent aider à protéger les groupes vulnérables.
Conclusion
La relation entre l’inflation et la pauvreté est un sujet complexe qui nécessite une attention particulière de la part des décideurs, non seulement au Ghana mais aussi dans le monde entier. Le cas du Ghana illustre les défis auxquels sont confrontés de nombreux pays en développement, où une inflation galopante peut rapidement effacer des années de progrès en matière de réduction de la pauvreté.
Il est intéressant de noter que même dans des pays développés comme la France, l’inflation est devenue une préoccupation majeure. Bien que les taux d’inflation soient généralement plus modérés en France par rapport au Ghana, l’impact sur le pouvoir d’achat et le niveau de vie est tout aussi réel.
Les prix des biens essentiels comme l’alimentation et l’énergie augmentent, grignotant le pouvoir d’achat des ménages, en particulier ceux à faible revenu. Cela crée une pression sur les systèmes sociaux et peut contribuer à une augmentation de la pauvreté relative, même dans des sociétés où le niveau de vie est globalement élevé.
Une approche multidimensionnelle est nécessaire pour résoudre ces problèmes, qu’ils se manifestent dans un pays en développement comme le Ghana ou dans une économie avancée comme la France ou l’Angleterre. Il est crucial de prendre des mesures immédiates pour éviter une crise plus grande, que ce soit par des interventions politiques, des mesures fiscales ou des programmes sociaux ciblés.
Quittez la dictature économique et numérique grâce à la Lettre Confidentielle :
Jean D, rédacteur pour Géopolitique Profonde