Comprendre la relation Chine-Occident
La Chine est une puissance montante qui suscite à la fois crainte et admiration en Occident.
- Quels sont les enjeux géopolitiques, économiques et culturels de cette relation complexe ?
- Comment la France et l’Europe peuvent-elles coopérer avec la Chine sans se soumettre ni s’opposer ?
Laurent Michelon, auteur du livre “Comprendre la relation Chine-Occident”, nous éclaire sur ces questions.
La guerre froide entre la Chine et les États-Unis
La rivalité stratégique entre la Chine et les États-Unis évoque la période de la guerre froide entre l’URSS et les États-Unis, se déclinant à différents niveaux, militaire, économique, technologique, et idéologique, et mettant en opposition deux visions du monde et de développement.
L’Occident a souvent des idées préconçues sur la Chine, qu’il associe au communisme et à la dictature, négligeant la diversité culturelle et les aspirations de son peuple, et craignant une remise en question de l’ordre mondial dominé par les États-Unis.
La Chine, quant à elle, se sent menacée par les ingérences et les provocations des États-Unis, qui cherchent à contenir sa montée en puissance.
Elle revendique sa souveraineté, sa sécurité nationale et son droit au développement, adoptant une approche pragmatique et flexible dans ses relations internationales.
Il est crucial de comprendre la Chine, sa logique, sa culture, son histoire, ses ambitions, ses forces et ses faiblesses, et d’engager un dialogue respectueux et lucide, sans naïveté ni hostilité, avant qu’elle ne focalise son attention sur nous.
La situation en Chine et à Hong Kong
La Chine, pays vaste et variée, fait face à des changements rapides et profonds ainsi qu’à divers défis tels que la croissance économique, la réduction de la pauvreté, la protection environnementale, la lutte contre la corruption et les réformes politiques.
Pour maintenir la stabilité et l’unité du pays ainsi que pour renforcer la légitimité du Parti communiste chinois, la Chine a instauré un système de contrôle social reposant sur la surveillance, la censure et la répression, suscitant souvent des critiques de la part de l’Occident concernant les droits de l’homme et les libertés individuelles.
Cependant, il convient de nuancer ce contrôle social en Chine, qui n’est ni absolu ni uniforme.
Des espaces de liberté et de contestation existent, notamment sur internet, dans les médias et la société civile, ainsi que des disparités régionales et locales dans l’application des normes.
Par ailleurs, il est pertinent de comparer ce contrôle social chinois à celui présent en Occident, plus subtil et plus insidieux mais tout aussi efficace.
Hong Kong, ancienne colonie britannique rétrocédée à la Chine en 1997, bénéficie du principe « un pays, deux systèmes », garantissant son autonomie.
Dotée d’un système politique, économique, juridique et culturel distinct de la Chine continentale, Hong Kong demeure un important pôle financier et commercial, attirant des investisseurs et des touristes du monde entier.
Les troubles sociaux survenus à Hong Kong en 2019-2020, initialement déclenchés par un projet de loi sur l’extradition vers la Chine, ont mis en lumière un malaise plus profond.
Les manifestants ont exigé davantage de démocratie, de liberté et d’autonomie, ainsi que la cessation des ingérences de Pékin. Ils ont été soutenus par les États-Unis et le Royaume-Uni, qui ont vu dans ces événements une occasion de déstabiliser la Chine.
En réponse, la Chine a instauré la loi sur la sécurité nationale à Hong Kong, visant à réprimer les activités séparatistes, terroristes, subversives et étrangères.
Cette mesure a été condamnée par l’Occident, dénonçant une violation du principe « un pays, deux systèmes » ainsi qu’une menace pour les droits de l’homme et les libertés fondamentales.
De son côté, la Chine affirme agir dans le cadre de sa souveraineté et de sa sécurité nationale, tout en respectant le haut degré d’autonomie de Hong Kong.
Le conflit israélo-palestinien et le rôle de la Chine
Le conflit israélo-palestinien, l’un des plus anciens et complexes, oppose deux peuples revendiquant le même territoire historique de la Palestine, confrontés à des injustices et violences, et implique des acteurs régionaux et internationaux aux intérêts divergents.
La position de la Chine sur ce conflit est modérée et équilibrée.
Elle soutient le droit du peuple palestinien à l’autodétermination et à la création d’un État indépendant, avec Jérusalem-Est comme capitale, tout en appelant à la fin de l’occupation et de la colonisation israéliennes, ainsi qu’au respect des résolutions de l’ONU et du droit international.
La Chine condamne la violence, qu’elle provienne des Israéliens ou des Palestiniens.
En dépit de ces positions, la Chine maintient une coopération historique et stratégique avec Israël, reconnaissant son droit à l’existence et à la sécurité, et entretenant des relations diplomatiques et culturelles avec lui, sans hostilité ni préjugé, respectant sa diversité et sa créativité.
En tant qu’acteur constructif et impartial, la Chine promeut le concept de sécurité indivisible, fondé sur le dialogue, la confiance, la coopération et le développement, soutenant la solution des deux États comme seule voie réaliste et durable pour la paix et la justice.
Elle appelle à la reprise des négociations entre les parties, avec le soutien de la communauté internationale.
Le dialogue stratégique franco-chinois
Les relations entre la France et la Chine ont une longue histoire, remontant au XVIIIe siècle, marquée par des moments forts tels que la reconnaissance de la République populaire de Chine par le général de Gaulle en 1964, ainsi que la visite du président Xi Jinping en France en 2023.
Cependant, elles ont également connu des périodes de tension et de méfiance, notamment sous la présidence de Nicolas Sarkozy, qui a adopté une attitude hostile envers la Chine.
Malgré ces hauts et bas, la France et la Chine partagent des intérêts communs. Elles sont toutes deux des puissances nucléaires, des membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU, des acteurs majeurs de la gouvernance mondiale.
Elles entretiennent d’importants échanges économiques et culturels, ainsi que des coopérations dans divers domaines tels que le climat, la santé, l’éducation et la recherche. Cependant, des divergences persistent sur des questions sensibles telles que les droits de l’homme, le Tibet, Taïwan et la mer de Chine méridionale.
Afin de renforcer la confiance, de résoudre les différends et de saisir les opportunités, la France et la Chine ont besoin d’un dialogue stratégique fondé sur le respect mutuel, l’égalité, la compréhension et la franchise, adapté aux évolutions du monde et aux réalités du XXIe siècle.
La France et la Chine ont un rôle à jouer ont un rôle crucial à jouer dans la construction d’un ordre mondial plus juste, stable et durable.
Bien qu’elles puissent être à la fois des partenaires et des concurrents, elles doivent éviter les confrontations et les dépendances excessives, privilégiant un équilibre entre coopération et compétition, tout en respectant la diversité des civilisations et des valeurs, et en favorisant le dialogue et le multilatéralisme.
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