🔥 Les essentiels de cette actualité
- L’OTAN veut doubler ses dépenses militaires à 5 % du PIB d’ici 2035, un bond massif présenté comme une avancée en défense collective. Mais quels sont les véritables enjeux?
- La menace est floue : Russie, Chine, Iran, Corée du Nord, terrorisme… Une vague justifiant des budgets militaires colossaux, mais payés par les contribuables.
- L’industrie de l’armement prospère pendant que les services publics s’effondrent. La seule politique industrielle viable serait-elle celle de la guerre?
- Mark Rutte encense Trump malgré ses ambiguïtés sur l’article 5, montrant une allégeance aux États-Unis et minimisant les tensions entre alliés.
Les puissances occidentales ont publié mercredi un communiqué martial dans lequel elles annoncent vouloir atteindre un niveau de dépenses militaires équivalent à 5 % de leur PIB d’ici 2035.
Cette annonce est loin d’être anodine : il s’agit de plus que doubler l’objectif précédent, fixé à 2 %. Un virage massif que les chefs de l’alliance présentent comme un « bond en avant » dans la défense collective.
À l’époque, on nous avait vendu les 2 % comme un seuil « raisonnable » et « nécessaire ». Aujourd’hui, il faudrait avaler l’idée que 5 % du PIB consacrés à l’armée sont la réponse logique aux enjeux actuels.
Ce nouvel objectif inclut au moins 3,5 % pour la défense pure, le reste étant destiné à la sécurité intérieure et aux infrastructures critiques liées à la défense, censées renforcer la préparation et la résilience civiles.
Des chiffres qui piquent – et que personne ne veut vraiment mettre sur la table
Ce que personne ne dit – ou que beaucoup aimeraient planquer sous le tapis – c’est ce que ce chiffre de 5 % représente réellement pour l’Europe.
D’après les estimations de l’Institut Jacques Delors, pour atteindre cet objectif, les Européens devraient collectivement dépenser chaque année plus de 850 milliards d’euros. Oui, plus de 850 milliards, soit 2,5 fois ce qu’ils dépensent aujourd’hui.
Et ce, sans croissance économique. Juste en grattant dans les poches des États, autrement dit dans celles des citoyens.
Même si on restait « modestes » et qu’on s’en tenait aux 3,5 % de dépenses « strictement militaires », il faudrait trouver 270 milliards d’euros supplémentaires chaque année.
À titre de comparaison, c’est l’équivalent de trois fois le budget total de l’Éducation nationale en France.
France : une économie sacrifiée sur l’autel militaire
En France, d’après le ministère de l’Économie, le budget de la défense atteint 59,9 milliards d’euros en 2025, soit 2,03 % du PIB – pile dans les clous de l’Otan, qui avait fixé ce seuil en 2014.
Mais pour répondre aux nouvelles exigences, il faudra doubler ce budget, c’est-à-dire dégager chaque année près de 145 milliards d’euros.
Si on garde le niveau de richesse nationale inchangé, ce qui est bien possible vu la croissance, ça veut dire qu’il faudra trouver 85 milliards supplémentaires chaque année.
Où ? Facile : on peut rayer l’Éducation (86,9 milliards), le Travail (19,9 milliards), la Sécurité (25 milliards) ou encore la Justice (12,2 milliards).
Voilà, l’armée est servie. Les écoles peuvent fermer, les tribunaux s’effondrer, les policiers se débrouiller, les chômeurs attendre — tout va bien, on achète des Rafale.
Le refrain bien connu de la « défense collective »
Le grand argument, toujours le même, repose sur la fameuse « défense collective » prévue par l’article 5 du traité de l’Atlantique Nord.
L’OTAN martèle que son engagement est « indéfectible » : une attaque contre l’un serait une attaque contre tous. Un principe sacré.
Pourtant, la réalité est moins claire. On ne sait toujours pas exactement contre qui cette guerre est censée se préparer.
Moscou est désignée comme l’ennemi numéro un, la menace à long terme par excellence. Mais la Chine est également présente dans les discours, tout comme l’Iran, la Corée du Nord ou encore le terrorisme.
Le danger est flou, mouvant, et surtout pratique. Car plus la menace est vague, plus on peut justifier n’importe quel budget militaire, aussi colossal soit-il.
Défense collective, mais payée par qui ?
Derrière ces grandes déclarations de solidarité atlantique, une seule constante : ce sont les contribuables qui passent à la caisse.
Alors que les chefs d’État signent à coups de stylos dorés des engagements à plusieurs dizaines de milliards d’euros, les citoyens subissent la hausse des prix, la casse des services publics et le mépris croissant des élites.
La fameuse « unité » de l’OTAN se traduit toujours par la même chose : les peuples paient pendant que les dirigeants paradent.
Les alliés doivent désormais soumettre des plans annuels détaillant leur progression vers cet objectif, sous la pression américaine de ces dernières années, particulièrement sous la présidence Trump, qui a fortement insisté pour un partage plus équitable du fardeau de la défense.
Une économie de guerre qui fait des heureux
Évidemment, tout cela n’est pas sans bénéficiaires.
L’industrie de l’armement, elle, prospère. Chaque nouvelle « menace » est une opportunité de marché. Chaque sommet de l’OTAN s’accompagne d’une pluie de contrats pour les géants du secteur.
Pendant que les hôpitaux ferment, que les enseignants manquent et que les services sociaux s’effondrent, ce sont ces groupes qui encaissent des fortunes.
À croire que la seule politique industrielle encore viable en Europe est celle de la guerre.
Le secrétaire général de l’OTAN, Mark Rutte, ne s’en cache pas : les décisions prises vont « non seulement renforcer la sécurité, mais aussi créer des emplois ».
Un sommet sous le signe de l’optimisme diplomatique
Mark Rutte n’a pas hésité à encenser Donald Trump, affirmant qu’« il mérite tous les éloges », malgré les déclarations pour le moins ambiguës du président américain sur l’article 5, ce pilier fondamental de la défense collective de l’OTAN.
Trump avait en effet laissé entendre qu’« il existe de nombreuses définitions de l’article 5 », avant de promettre son amitié et son aide aux alliés, révélant ainsi toute la flexibilité pratique de cet engagement.
La déclaration de Rutte sonne comme une marque d’allégeance plutôt qu’un simple soutien : conscient de l’importance stratégique des États-Unis au sein de l’alliance, il fait preuve d’un empressement évident à rassurer Washington, insistant sur sa « totale confiance » envers Trump et affirmant que les États-Unis restent pleinement engagés dans le pacte.
Enfin, Rutte a aussi pris soin de minimiser les réticences de l’Espagne, déclarant croire en la « sérieux » et l’engagement de Madrid à atteindre l’objectif minimal de 3,5 % du PIB en dépenses militaires.
Une démonstration supplémentaire de l’apparente unité, qui masque mal les tensions persistantes entre alliés.
Toujours plus pour la guerre, toujours moins pour les peuples
Nos gouvernements osent encore parler de « sacrifices » nécessaires. Ils appellent à « l’effort » et à la « résilience », tandis qu’ils injectent des fortunes dans des programmes militaires opaques et dans des infrastructures dites « critiques » pour la défense.
Pendant ce temps, les citoyens doivent se contenter de discours creux sur la « sobriété » alors que leurs impôts financent chars, missiles et avions de chasse dernier cri.
Le choix est clair : on préfère les tanks aux cantines scolaires, les F-35 aux urgences, les discours guerriers aux réalités sociales.
Cette montée en puissance de l’OTAN, présentée comme un rempart contre des menaces incertaines, fait surtout peser sur les populations le poids d’une politique sécuritaire aux profits bien identifiés, au détriment des besoins sociaux et humains.
IMPORTANT - À lire
Vous voulez aller plus loin que les discours guerriers et comprendre les réalités géopolitiques derrière cette montée en puissance de l'OTAN ? Notre revue papier approfondit chaque mois les enjeux stratégiques et les tensions persistantes entre alliés, au-delà de l'apparente unité affichée.
Pendant que l'industrie de l'armement prospère, découvrez dans notre revue des analyses poussées sur l'impact de cette économie de guerre sur les citoyens. Nous décryptons les choix politiques qui privilégient les dépenses militaires au détriment des besoins sociaux et humains.