🔥 Les essentiels de cette actualité
- François Bayrou propose un référendum choc sur les finances publiques, une initiative solitaire qui divise la majorité et irrite l’Élysée.
- Le plan vise une austérité drastique pour réduire le déficit, mais les classes moyennes paieront le prix fort.
- Face à une Assemblée ingouvernable, Bayrou joue sa dernière carte, mais sa stratégie est déjà vouée à l’échec.
À peine nommé à Matignon, François Bayrou provoque un séisme politique. Dans un entretien au Journal du Dimanche du 3 mai, il lance l’idée explosive d’un référendum sur un « plan d’ensemble » pour redresser les finances publiques. Présentée comme un sursaut démocratique, cette proposition tombe comme un pavé dans la mare. Elle n’a été ni concertée, ni anticipée — un coup d’éclat qui en dit long sur l’isolement du Premier ministre et la fragilité de son assise politique.
« La question budgétaire est assez grave, assez lourde de conséquences pour l’avenir de la nation, pour qu’elle s’adresse directement aux citoyens », affirme Bayrou.
Derrière ce ton solennel, c’est en réalité une tentative désespérée de faire porter aux Français la responsabilité de coupes budgétaires inévitables. En clair : si vous souffrez, c’est que vous l’avez choisi.
L’Élysée agacé, la majorité divisée
L’entourage de Macron n’a pas tardé à réagir avec froideur. Un conseiller présidentiel a sèchement tempéré l’enthousiasme de Matignon :
« Tant que le plan évoqué par le Premier ministre n’est pas connu, il est difficile de se prononcer. »
Traduction : l’Élysée n’approuve pas. Bayrou, pourtant censé incarner la continuité, s’est permis une initiative solitaire — une hérésie dans une Ve République présidentialisée à l’extrême.
Le président, fidèle à son positionnement jupitérien, n’a jamais toléré que l’on empiète sur ses prérogatives. Ce référendum, annoncé sans coordination, apparaît comme une tentative de s’émanciper, sinon de se démarquer. Mais dans une majorité déjà fracturée, cet acte d’indépendance n’a pas séduit : même au sein de la coalition présidentielle, les soutiens se font rares.
Une tentative politique déjà vouée à l’échec ?
Bayrou n’en est pas à son coup d’essai. En février, il avait déjà évoqué une consultation populaire sur les retraites. Macron l’avait alors recadré depuis l’étranger, affirmant : « La Constitution est claire dans ses termes. » Un avertissement qui aurait dû refroidir ses ardeurs. Cette fois, Bayrou a pris soin d’informer l’Élysée. Mais le fond de sa stratégie n’a pas changé : contourner les institutions pour s’adresser directement à l’opinion.
« Tout mettre sur la place publique devant les Français même si cela peut être déconcertant », justifie un conseiller.
Cette posture de transparence masque en réalité une manœuvre politique bien rodée. En se posant en porte-voix du peuple contre les technocrates budgétivores, Bayrou cherche à exister politiquement — quitte à se couper de ses alliés.
Un plan budgétaire impopulaire… et douloureux
Concrètement, le projet vise à faire passer le déficit public de 5,8 % du PIB en 2025 à 3 % d’ici 2029. Derrière cet objectif se profile un programme d’austérité sans précédent. Bayrou prépare un tour de vis deux fois plus sévère que prévu. La promesse : une dette qui commencera enfin à diminuer.
Mais à quel prix ? Ce ne sont pas les grandes fortunes ou les multinationales qui feront les frais de ces restrictions. Ce sont les contribuables, les retraités, les classes moyennes, les familles. Comme toujours, ceux qui n’ont ni moyens d’optimiser leurs revenus, ni voix pour se faire entendre.
Le Premier ministre promet pourtant qu’il n’y aura pas de hausse d’impôts. Il rejette la suppression de l’abattement fiscal des retraités proposée par Amélie de Montchalin, ou encore la « contribution modeste » aux collectivités imaginée par François Rebsamen. Mais cette ligne de défense paraît bien fragile face à l’appétit budgétaire de l’État.
Un système à bout de souffle
Ce plan austéritaire se heurte à une réalité institutionnelle : l’Assemblée nationale est ingouvernable. Fragmentée, divisée, incapable de produire un consensus, elle transforme chaque réforme en bras de fer stérile. Les oppositions se neutralisent. La majorité relative, déjà fragile, vacille.
Et pendant ce temps, la dette enfle, les déficits se creusent, le pouvoir d’achat s’effondre. Le gouvernement promet des économies, mais personne ne veut porter le chapeau. Chacun renvoie la balle à l’autre, et les mesures courageuses attendent toujours.
Ce marasme est le fruit d’un système verrouillé, qui protège ses élites tout en laissant les citoyens assumer seuls les conséquences économiques. Il n’est pas étonnant que la défiance explose.
Le budget 2026 : un champ de mines
Sophie Primas, présidente LR de la commission des finances du Sénat, l’a déclaré : préparer le budget 2026 est un « cauchemar ». Aucun ministère ne veut céder. L’Assemblée est paralysée. L’opposition sent venir le piège et prépare déjà ses armes : la motion de censure.
Thomas Cazenave, ancien ministre du Budget, reconnaît aujourd’hui que les marges de manœuvre sont nulles. La dette est trop élevée, les recettes stagnent, la croissance s’épuise.
Et pendant ce temps, le peuple subit : inflation galopante, services publics en déliquescence, fiscalité confiscatoire. La classe politique continue de discuter entre elle, sans répondre aux angoisses concrètes des Français.
Un référendum pour quoi faire ?
En soixante-cinq ans, la France n’a organisé que dix référendums. Aucun n’a porté sur une politique budgétaire. Pourquoi ? Parce que ces sujets sont trop complexes, trop techniques, trop divisifs.
Le projet de Bayrou ne résiste pas à l’analyse constitutionnelle. L’article 11 ne permet pas de référendum sur le budget. L’idée est juridiquement bancale, politiquement risquée, et socialement inflammable.
« Quelle question poser ? “Voulez-vous faire des économies ?” Sur quoi ? », ironise Philippe Lottiaux (RN).
Même les constitutionnalistes comme Benjamin Morel alertent : vouloir passer en force par référendum sur des enjeux aussi complexes est une impasse.
La classe politique désavoue Bayrou
Rarement une initiative aura suscité un tel rejet unanime. À gauche, Éric Coquerel (LFI) n’y croit pas : « Ce référendum n’aura pas lieu. » Olivier Faure (PS) évoque un scénario « ubuesque ». Christine Arrighi (EELV) accuse le pouvoir de poursuivre la même logique austéritaire sous un vernis démocratique.
À droite, Wauquiez dénonce une fuite en avant : « Les Français en ont ras-le-bol des hausses d’impôts, pas besoin de référendum pour le savoir. » Il fustige un Premier ministre incapable de trancher, préférant les effets d’annonce à l’action.
Même dans la majorité, la méthode choque. Jean-François Husson (LR) rappelle que le Parlement n’a pas été consulté. Le gouvernement parle de concertation, mais agit seul. Les parlementaires voient là un camouflet, un mépris de leur rôle constitutionnel.
Bayrou, recordman d’impopularité
Désigné par Macron pour calmer le jeu, Bayrou est déjà rejeté. Il pulvérise les records d’impopularité pour un Premier ministre si tôt dans son mandat. Ni la droite ni la gauche ne le soutiennent. Le peuple ne le reconnaît pas. La presse ne le ménage pas.
Sa nomination, loin de rassurer, a été perçue comme une provocation supplémentaire de Macron. Encore un visage du vieux monde. Encore un homme coupé des réalités. Encore un pion dans le grand jeu des chaises musicales de l’exécutif.
Et les Français, eux, continuent de serrer la ceinture.
Bayrou voulait donner la parole au peuple. Mais ce peuple n’a pas besoin de consultation : il crie déjà sa colère dans les urnes, dans la rue, dans son quotidien.
Le référendum annoncé par Bayrou pourrait bien se transformer en plébiscite contre lui. Et plus largement, contre un système qui refuse de se remettre en cause.
IMPORTANT - À lire
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