L’AXE NÉOCONSERVATEUR VS. LE PÔLE EURASIEN

Néoconservatisme et eurasie en géopolitique

Jérusalem et l’axe néoconservateur (Washington-Riyad-Tel-Aviv)

Sur Jérusalem, Donald Trump a déclaré reconnaître la ville sainte comme capitale d’Israël (une promesse de campagne tenue) et a précisé dans le même temps que le transfert de l’ambassade prendra des années. Finalement, cette nouvelle ambassade doit être inaugurée en mai prochain. Cette situation a le mérite de mettre à jour l’imposture d’une médiation américaine dans le conflit israélo-palestinien et ses négociations stériles depuis 70 ans. Le parti pris US est pourtant évident. Cette reconnaissance purement symbolique va peut-être bien faire bouger la situation, en bien ou en mal selon le point de vue.

En tout cas, le coup semble calculé : selon LPoint, en novembre dernier le prince héritier d’Arabie saoudite, Mohammed Ben Salmane, avait déjà émis l’idée au n°1 de l’autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, de renoncer à faire de Jérusalem-Est la capitale de l’inatteignable État palestinien au profit d’Abu Dis (petite ville à l’est de Jérusalem). À noter que Mohammed Ben Salmane est conseillé par le maître incontesté de l’ubiquité, Jacques Attali (ils seconnaissent depuis 8 ans). Ce dernier, qui a découvert et promu l’actuel président français Emmanuel Macron, avait déjà exprimé en 2011 son souhait de voir Jérusalem comme capitale d’un futur gouvernement mondial dans une interview sur Public Sénat.

Le rapprochement israélo-saoudien, relevé dès l’année dernière, a récemment été confirmé par le général israélien Gadi Eizenkot dans une interview parue sur le journal saoudien enligne Elaph (basé à Londres). Pour la première fois, un gradé israélien a donc donné une interview à un journal lié à l’Arabie saoudite, en plaidant pour l’échange de renseignements confidentiels entre les deux pays sur l’Iran. Israël a également récemment signé un accordbilatéral avec l’OTAN pour faciliter les échanges de renseignements classifiés.

L’Arabie Saoudite ira-t-elle au bout de la logique en abandonnant la question palestinienne pour accentuer la coalition contre l’Iran, en partenariat avec Israël  ? Le Saker Francophone relève des éléments qui iraient dans ce sens. Difficile à tenir en matière d’image, mais les relations aujourd’hui assumées avec Israël ouvrent de nombreux champs de possibilités. L’axe Washington-Riyad-Tel-Aviv est donc officiellement acté. Effectif depuis des décennies à travers le fameux courant néoconservateur, les visées géopolitiques, énergétiques et eschatologiques de ses partisans ne sont pas à prendre la légère ; ou quand le sionisme (judaïsme politique), le wahhabisme (l’islam politique) et le christianisme évangéliste convergent officiellement.

La décision de reconnaître Jérusalem comme capitale d’Israël pourrait finalement être un cadeau empoisonné pour Israël dans sa tentative de normalisation des rapports avec ses voisins. Mais certains, comme le Cheikh Rached Ghannouchi, président du parti islamiste tunisien Ennahdha (issu des Frères musulmans), auraient également eu la volonté d’introduire un dialogue en rencontrant en secret des dirigeants israéliens à Washington. L’information reste encore à confirmer, mais ce même individu s’était déjà précédemment engagé à faciliter l’ouverture d’une représentation officielle d’Israël en Tunisie.

Jérusalem et l’axe néoconservateur (Washington-Riyad-Tel-Aviv)

Poutine et Xi Jinping

​Le propos de l’analyste Sarang Shidore pour Stratfor (entreprise traduisant la vision politique de la CIA), ne nie plus l’évidence, à savoir l’alliance informelle Chine-Russie effective depuis la crise ukrainienne de 2014. Avant sa visite en Chine le mois dernier, le président russe Vladimir Poutine déclarait : « Dire que nos deux pays coopèrent stratégiquement est dépassé. Noustravaillons désormais ensemble sur tous les grands sujets ». L’auteur assimile cet axe à une nouvelle bipolarité, à laquelle se greffe l’Iran. La Chine investit d’ailleurs massivement dans ce dernier pays et compte y développer ses échanges économiques pour atteindre les 600 Md$ en 10 ans, soit l’actuel volume du commerce entre les USA et la Chine (Géoéconomie n° 82, juin-juillet 2017, p.59). Des pourparlers sont également en cours pour intégrer l’Iran dans l’Organisation de coopération de Shanghai, une alliance sécuritaire et économique en devenir.

La Turquie n’est cependant pas intégrée à cet axe. Pourtant de nombreux éléments poussent cette dernière à remettre en question son appartenance à la politique étrangère néoconservatrice. Yalcin Topcu, conseiller en chef du président turc Recep Tayyip Erdogan, a d’ailleurs plaidé publiquement pour une reconsidération de l’appartenance de la Turquie à l’OTAN. D’autres pays comme la Hongrie, la Grèce, la Slovaquie et l’Islande réfléchissent égalementau coût de leur adhésion à l’atlantisme, pendant que « l’Europe de la défense  » (infaisable sansla Grande-Bretagne) avance à très petit pas. Est-ce que cette alliance Chine-Russie résistera à l’après-Vladimir Poutine-Xi Jinping ? Rien n’est moins sûr.

Franck Pengam

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