LE POINT SUR LE BREXIT

Brexit et économie

​Brexit : des chiffres à contre-courant et des bâtons dans les roues

Si le Brexit amène son lot de difficultés au Royaume, l’industrie britannique engrange ses plus fortes commandes depuis 1988. À l’image de l’actuelle politique intérieure américaine, le pays veut miser sur une réindustrialisation. Ce point n’a pas échappé à la 1re puissance économique mondiale, la Chine (dette publique et privée en 2015  : 27 000 milliards de dollars, soit un endettement de 250 % à 300 %, selon Géoéconomie n° 82, juin-juillet 2017, p.62), qui privilégiedes investissements sur place plutôt que dans les pays membres de l’Union européenne. Un fond d’investissement bilatéral de plusieurs milliards de dollars serait notamment prévu. L’Express confirme également que la fuite massive des capitaux de la City suite au référendum sur le Brexit est « une légende », en s’appuyant sur une étude récente du Financial Times.

Le Brexit va d’ailleurs priver l’UE de 10 Mds € de recettes par an et rapporter autant aux Britanniques selon LeMonde (28 novembre 2017). Quant au coût du retrait de la Grande-Bretagne de l’UE, il s’élèverait de 45 à 55 Mds € par an selon la presse britannique, jusqu’à 60 milliards d’euros par an selon l’institut allemand Ifo. Ce dernier a d’ailleurs produit une étude qui révèle que les États membres pourraient devoir débourser jusqu’à 44 Mds € supplémentaires par an pour combler l’absence des Anglais, qui étaient contributeurs nets de l’UE. Les pays membres contributeurs nets restant, comme la France, vont probablement pâtir de cette situation. Le Brexit implique également une réduction de 14,8 % du budget Fonds européen de développement (aide au développement à l’Afrique), Londres étant l’un de ses plus généreux contributeurs (409 M£). À partir de 2019, les intérêts britanniques se concentreront vers son ancien empire du Commonwealth. Ces chiffres toujours provisoires fluctueront selon les aléas des pourparlers.

Selon les dernières négociations, il n’y aura pas de frontière physique entre l’Irlande et la province britannique d’Irlande du Nord et les droits des 3 millions d’Européens habitant outre-Manche et du million d’expatriés britanniques dans l’UE seront conservés. Pour la suite, il est certain que tout sera fait pour que la GB soit sanctionnée durement pour sa sortie de l’UE, car dans le cas contraire, d’autres pays très eurosceptiques comme l’Italie pourraient se pencher vers un exit.

Brexit

Le Royaume-Uni a atteint des records dans de nombreux secteurs économiques

L’article 50 du Traité sur l’Union européenne prévoit une durée de deux ans après lanotification pour conclure l’accord de retrait entre le Royaume-Uni et l’UE. Avec ou sans accord, le repli interviendrait le 29 mars 2019 avec des effets immédiats.

En attendant la formalisation du Brexit, le classement Forbes 2018 a mis le Royaume-Uni en tête de son 12e classement des meilleurs pays pour les entreprises. Le renommé The Economist confirme que les pronostics pré-Brexit étaient faux : l’économie outre-Manche se porte plutôt bien, la récession n’a pas eu lieu, la croissance est de 1,9 % (en tête du G7) et les prix des logements sont restés stables. Selon le Bureau de la Statistique Nationale (Office for National Statistics), 32,2 millions d’individus ont un emploi en GB (un record) et le taux de chômage à 4,3 % est le plus bas depuis 42ans. Les salaires ont également augmenté à leur rythme le plus élevé depuis presque un an (+ 2,4 %). L’ancien premier ministre David Cameron, principal adversaire du Brexit, avoue lui-même que la catastrophe annoncée n’est pas survenue. À noter à la marge que la relation franco-britannique est particulièrement au beau fixe dans ledomaine de la défense, avec le développement d’un corps expéditionnaire interarmées conjoint et une collaboration accrue au Sahel, dans l’innovation militaro-industrielle et dans la sécurité intérieure.

De beaux éléments contrastés par le rapport de la Fondation Robert-Schuman (Question d’Europe n° 457, 08/01/18, p.27-28). L’équilibre commercial serait bien plus défavorable au Royaume-Uni qu’au marché unique. En 2015, les exportations britanniques vers l’UE totalisaient près de 45 % de ses exports (13 % de l’économie britannique), alors que la part du Royaume-Uni ne représente que 7 % en moyenne du total des exportations de l’Union européenne (environ 3 % à 4 % des économies des États membres dans leur ensemble). Le Royaume-Uni pourrait donc chercher à obtenir un statut proche de celui de la Norvège pour éviter d’être trop désavantagé commercialement. De plus, selon une note interne confidentielle du gouvernement britannique qui a fuité, le Royaume-Uni est condamné à une croissance en diminution, quel que soit l’accord conclu avec l’UE au sujet du Brexit. Une baisse de la livresterling a également eu lieu fin avril 2018 suite à l’incertitude émise par le gouverneur de la Banque d’Angleterre au sujet d’une hausse des taux.

La Commission européenne va demander un effort pécuniaire supplémentaire auxpays membres pour combler les pertes attendues dans le budget de l’UE après le départ du Royaume-Uni. Le très philanthrope GeorgeSoros (« l’homme qui fit sauter laBanque d’Angleterre ») a investi environ 565 000 € pour que les Anglais puissent lutter contre l’imminente sortie, notamment en demandant un deuxième référendum sur le Brexit. La fondation du milliardaire a soutenu l’association Best for Britain, qui fait campagne pour mettre un terme à la procédure du Brexit et organiser ce nouveau référendum. Le 28 février dernier, l’ancien premier ministre britannique John Major a aussi défendu l’idée d’un second référendum, car, selon lui, les Britanniques ont été « induits en erreur  » sur les conséquences du leave.

Franck Pengam

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