Vaincre le terrorisme djihadiste : l’analyse de Jacques Baud
Jacques Baud est un ancien colonel de renseignement suisse et l’auteur du livre “Vaincre le terrorisme djihadiste”.
Dans notre entretien, il nous livre son expertise sur les origines, les motivations, les stratégies et les méthodes du terrorisme djihadiste, ainsi que sur les erreurs et les faiblesses des pays occidentaux face à ce phénomène. Il nous éclaire également sur les situations au Moyen-Orient, en Afrique, en Ukraine et en Palestine, et sur les enjeux géopolitiques et sécuritaires qui s’y posent.
Le terrorisme djihadiste est mal connu en France
Selon Jacques Baud, le terrorisme djihadiste demeure mal compris en France en raison de l’absence d’une approche scientifique et rigoureuse de ce phénomène.
Cela entraîne des réactions souvent guidées par l’émotion et le politiquement correct, ce qui entrave la compréhension de la logique des groupes terroristes.
Jacques Baud soutient que le terrorisme djihadiste ne relève pas simplement d’une folie meurtrière, mais constitue un calcul stratégique utilisant l’islam comme logiciel de fonctionnement.
Ce type de terrorisme a émergé suite au déclin du marxisme en tant qu’idéologie révolutionnaire, s’inspirant du nationalisme religieux, tel que le sionisme.
Le terrorisme djihadiste est une méthode de guerre asymétrique
Jacques Baud met en avant le caractère asymétrique du terrorisme djihadiste, une méthode de guerre qui exploite les faiblesses de l’adversaire, vise à produire un impact psychologique et médiatique, et s’adapte constamment aux circonstances.
Il illustre son propos en évoquant l’attaque du 11 septembre 2001, soigneusement planifiée pour cibler les symboles de la puissance américaine, et ayant eu un impact significatif sur la politique et la société des États-Unis.
Il souligne ainsi l’absence de frontières pour ce type de terrorisme, qui peut frapper n’importe où dans le monde, y compris en Europe.
Le terrorisme djihadiste est un problème sécuritaire complexe
Jacques Baud insiste sur la complexité du problème sécuritaire lié au terrorisme djihadiste, soulignant la nécessité de faire la distinction entre ses objectifs et ses méthodes opérationnelles.
Il rappelle que le but ultime du djihadisme est l’établissement d’un État islamique, et que le terrorisme ne constitue qu’un moyen parmi d’autres pour y parvenir.
Jacques Baud met en lumière l’importance du respect du droit international et de la légitimité, souvent compromis par les pays occidentaux au nom de la lutte antiterroriste et dénonce la difficulté à concilier les impératifs de défense et de prévention, souvent perçus comme antagonistes ou négligés.
Le statut juridique des territoires palestiniens
Jacques Baud aborde le rôle majeur du conflit israélo-palestinien dans la radicalisation des musulmans, rappelant le statut juridique des territoires palestiniens, occupés par Israël depuis 1967 selon résolutions des Nations Unies.
Baud précise que malgré le retrait israélien en 2005, Gaza demeure un territoire occupé, car Israël exerce toujours un contrôle sur ses frontières, son espace aérien et son accès à la mer.
Il condamne fermement la colonisation forcée de la Cisjordanie, en violation du droit international et des accords de paix.
La riposte israélienne face aux attaques du Hamas
Jacques Baud critique la réponse israélienne aux attaques du Hamas, la jugeant disproportionnée et illégale.
Il souligne que le respect des principes de proportionnalité, de distinction et de précaution est essentiel pour les actions militaires, conformément au droit de la guerre et accuse Israël d’avoir utilisé les doctrines Hannibal et Dahiya, qui visent à maximiser les dommages et la destruction sans faire de distinction entre cibles militaires et civiles.
Il révèle également que lors de l’attaque du 7 Octobre, des civils israéliens ont été touchés par des tirs provenant de leur propre armée, qui a employé des munitions à fragmentation.
La faillite du renseignement israélien
Jacques Baud pointe la faillite du renseignement israélien, qui n’a pas su anticiper ni prévenir l’offensive du Hamas le 7 Octobre.
Il souligne l’importance pour le renseignement d’être précis, fiable et exploitable afin de guider la prise de décision et reproche à Israël d’avoir réagi de manière émotionnelle et arrogante, ignorant la réalité sur le terrain.
Selon lui, le renseignement israélien a été dépassé par les capacités du Hamas, qui a utilisé des tunnels, des drones et des roquettes sophistiquées.
La responsabilité de Ben Laden dans le 11 septembre
Jacques Baud remet en question la responsabilité de Ben Laden dans le 11 septembre, qu’il considère comme non prouvée.
Il affirme qu’il n’existe aucune preuve formelle de son implication et que les États-Unis n’ont pas fourni de preuves aux talibans, qui avaient demandé des preuves pour extrader Ben Laden.
Jacques Baud avance l’hypothèse selon laquelle les attentats auraient été perpétrés par une vingtaine de jeunes ingénieurs, motivés par la volonté de venger les frappes américaines de 1998 contre les camps d’Al-Qaïda en Afghanistan et au Soudan.
Contexte du 11 septembre 2001 et genèse du djihadisme
Jacques Baud analyse le contexte du 11 septembre 2001, considérant qu’il a favorisé l’émergence du terrorisme djihadiste et critique la réaction des États-Unis, qu’il juge disproportionnée et injuste, marquée par des frappes en Afghanistan et en Irak sans preuve de leur implication dans les attentats.
Il dénonce la création d’un sentiment d’humiliation et de révolte parmi les musulmans, qui se sont sentis agressés et méprisés par les pays occidentaux et soutient que le 11 septembre a marqué un tournant dans l’histoire du terrorisme djihadiste, renforçant sa popularité et sa légitimité.
Les attentats en Europe
Jacques Baud fait le lien entre les attentats en Europe et la participation des pays européens à la guerre en Irak.
Il avance que ces attaques visent à provoquer un retrait des troupes et à semer la peur et la division, évoquant le précédent espagnol de 2004, où un changement de gouvernement a suivi les attentats de Madrid.
Il souligne que ces attaques en Europe résultent d’un malentendu, les islamistes considérant les pays européens comme des démocraties directes où le peuple a le pouvoir de décider de la politique étrangère.
La lutte contre le terrorisme
Jacques Baud propose des stratégies pour combattre le terrorisme, qu’il considère comme un défi majeur du XXIe siècle.
Il affirme que le terrorisme n’est pas inéluctable, qu’il est essentiel de comprendre et de traiter rationnellement ses causes et ses motivations, et de ne pas fournir de prétextes aux terroristes pour attaquer.
Jacques Baud, aborde les enjeux et les origines du terrorisme djihadiste, ainsi que les stratégies pour le combattre efficacement.
Il met en évidence qu’il ne s’agit pas d’actes irrationnels ou impulsifs, mais le fruit d’une stratégie calculée de la part de groupes cherchant à atteindre des objectifs politiques.
De plus, il souligne l’inefficacité de la seule réponse militaire ou policière, préconisant une approche axée sur l’éradication des causes profondes du problème, telles que les facteurs favorisant le recrutement, la radicalisation et la légitimation de la violence.
Enfin, il plaide en faveur d’une approche diplomatique plus prudente et respectueuse de la part de la France dans ses relations avec le Moyen-Orient, afin d’éviter d’aliéner une partie de sa population et de réduire les réactions hostiles inutiles.
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