Introduction
La situation tumultueuse au Proche-Orient a de nouveau été propulsée sur le devant de la scène internationale à la suite de l’Opération Al-Aqsa orchestrée par le Hamas le 7 octobre dernier, visant des colonies israéliennes près de Gaza.
Cette opération a non seulement provoqué une réaction de grande ampleur de la part d’Israël, mais a également mis en lumière les divergences entre les réactions internationales, en particulier celle des États-Unis et de leurs alliés occidentaux comparée à celle de la Russie et de la Chine.
Alors que Washington et ses alliés occidentaux ont exprimé un soutien sans réserve à Israël, Moscou et Pékin ont adopté une approche plus nuancée en réponse aux événements récents. Tout en condamnant la violence et le ciblage des civils, la Russie et la Chine ont souligné l’urgence d’une solution à deux États en Palestine, donc une position plus équilibrée par rapport à celle des pays occidentaux.
Les positions adoptées par ces deux grandes puissances ne sont pas seulement révélatrices de leurs politiques étrangères respectives, mais elles mettent également en lumière leurs ambitions et leurs intérêts géopolitiques dans une région qui reste un point chaud de tensions internationales.
La réaction des médias occidentaux a été de critiquer la prétendue équidistance de la Russie, la considérant plutôt comme un soutien déguisé à la Palestine, surtout dans le contexte de la guerre en Ukraine où les tensions entre la Russie et les nations occidentales sont à leur comble.
D’autre part, la Chine, tout en exprimant son désir de jouer un rôle positif pour aider les Palestiniens à parvenir à une réconciliation interne et à promouvoir des pourparlers de paix avec Israël, a été critiquée pour ne pas avoir condamné explicitement l’attaque palestinienne et qualifié le Hamas de faction « terroriste”.
Position de la Russie et de la Chine
La Russie et la Chine ont historiquement maintenu une position plus équilibrée sur la question israélo-palestinienne. Cette position se manifeste par une reconnaissance des droits des Palestiniens tout en maintenant des relations diplomatiques et économiques avec Israël.
Dans le contexte des récents affrontements entre Israël et le Hamas, la Russie et la Chine ont réitéré leur appel à une solution à deux États, tout en condamnant la violence et le ciblage des civils des deux côtés.
Cependant, dans la presse moscovite, des analyses soulignent une inclinaison plus prononcée de la Russie en faveur de la Palestine, notamment en relation avec la situation en Ukraine et les alliances avec les nations arabes et l’Iran. Cette position s’aligne avec la longue tradition de la Russie de soutien à la cause palestinienne, qui se manifeste par des rencontres régulières avec les représentants palestiniens et des appels à la fin des hostilités sans attribuer explicitement de blâme.
D’autre part, la Chine a également exprimé une sympathie historique envers la cause palestinienne. Lors de récentes conférences de presse, les représentants du gouvernement chinois ont condamné les pertes civiles et ont appelé à la cessation de la violence.
Ils ont également souligné le besoin urgent d’aborder les causes profondes du conflit et de promouvoir une solution à deux États. Le président chinois Xi Jinping a exprimé la volonté de son pays de jouer un rôle positif pour aider les Palestiniens à réaliser une réconciliation interne et à promouvoir les pourparlers de paix avec Israël.
La convergence des vues entre la Russie et la Chine sur la nécessité d’adopter une approche mesurée pour prévenir les combats entre Israéliens et Palestiniens est également notable. Elle traduit une volonté commune de rechercher une solution pacifique et durable au conflit, tout en reflétant leur aspiration à une plus grande influence régionale et globale.
Dans le même temps, cette divergence avec l’Ouest souligne la complexité des dynamiques géopolitiques en jeu dans la crise israélo-palestinienne.
Déclarations et actions récentes
Les événements récents ont suscité une série de déclarations et d’actions de la part des gouvernements russe et chinois, reflétant leur position sur le conflit israélo-palestinien et leur volonté d’agir comme médiateurs potentiels.
- Russie :
Elle a manifesté une préoccupation croissante quant à l’escalade de la violence entre Israël et la Palestine. Lors d’un sommet au Kirghizistan, le président russe Vladimir Poutine a comparé le blocus israélien de Gaza au siège de Leningrad par l’Allemagne nazie pendant la Seconde Guerre mondiale, qualifiant le siège de « inacceptable ».
Il a également mis en garde contre une attaque terrestre israélienne, soulignant qu’elle entraînerait des « conséquences graves pour toutes les parties » et que les pertes civiles seraient « absolument inacceptables« . En outre, Poutine a proposé la Russie comme médiateur, soulignant la nécessité de retourner à la table des négociations et de chercher des solutions pour mettre fin au bain de sang.
- Chine :
La Chine, quant à elle, a exprimé sa volonté de contribuer positivement à la résolution du conflit. Le ministre chinois des Affaires étrangères, Wang Yi, a critiqué l’offensive israélienne contre Gaza, affirmant qu’elle a « dépassé le cadre de l’autodéfense« .
Dans un appel téléphonique avec son homologue saoudien, il a condamné les actes qui nuisent aux civils et a appelé à une gestion collective de la situation pour éviter une escalade. De plus, l’envoyé spécial chinois au Moyen-Orient, Zhai Jun, a exprimé l’inquiétude de son gouvernement quant aux répercussions régionales et internationales de la crise, appelant la communauté internationale à rester vigilante.
Proposition de cessez-le-feu rejetée
Dans un effort plus récent, le 13 octobre, la Russie a proposé un projet de résolution au Conseil de sécurité de l’ONU visant à réduire la violence à Gaza. Ce projet condamne toute violence contre les civils et appelle à la désescalade des tensions, la reprise des négociations, un cessez-le-feu humanitaire, la libération des otages et l’accès à l’aide humanitaire.
La réaction des alliés occidentaux d’Israël aux positions russes et chinoises a été marquée par des critiques, notamment envers la Russie, qui a été accusée de tenir Israël et les États-Unis comme principaux responsables de l’éruption de violence au Moyen-Orient.
La proposition de la Russie à l’ONU a été rejetée depuis. Les pays ayant voté contre sont la France, les États-Unis, le Japon et l’Angleterre. Le délégué Russe a déclaré : “Tous ceux qui se sont opposés à notre projet de résolution pour un cessez-le-feu à Gaza portent la responsabilité de ce qui se passe.”
Implications internationales
La position adoptée par la Russie et la Chine sur la crise israélo-palestinienne s’inscrit dans un contexte géopolitique plus large, reflétant leur aspiration à une plus grande influence sur la scène internationale et leur désir d’équilibrer le pouvoir occidental, particulièrement celui des États-Unis.
Contexte des tensions avec les États-Unis :
Les tensions actuelles entre la Russie et les États-Unis en Ukraine, ainsi qu’entre la Chine et les États-Unis sur la question de Taïwan, ont une influence certaine. Pour eux, les États-Unis sont tout simplement inaptes à résoudre des conflits internationaux majeurs. Ce qui n’est pas totalement faux si l’on porte un regard critique sur la politique extérieure américaine de ces dernières décennies…
Cela s’est manifesté par les critiques de Vladimir Poutine, où il a reproché aux États-Unis d’ignorer les mécanismes existants pour résoudre la question palestinienne et de tenter de remplacer les solutions aux problèmes politiques fondamentaux par des « aides » de diverses sortes.
Influence économique et stratégique :
La Russie et la Chine ont des intérêts économiques et stratégiques substantiels dans la région du Moyen-Orient. Par exemple, le commerce entre la Chine et les nations arabes a dépassé 431 milliards de dollars à la fin de 2022, témoignant de l’engagement croissant de la Chine dans la région, en partie grâce à son Initiative Belt and Road.
De même, la Russie entretient des relations économiques étroites avec plusieurs nations de la région, comme en témoigne un volume de commerce qui s’élevait à 20 milliards de dollars à la fin de l’année dernière. L’exemple des échanges est parlant, où le blé Russe représentait en 2022 57 % des importations totales de l’Égypte, contre 50 % en 2021. Ces relations économiques mettent en évidence leur intérêt à maintenir une stabilité régionale afin de maintenir un commerce stable.
Recherche de légitimité internationale :
Enfin, en proposant des solutions de médiation et en prônant une approche plus équilibrée, la Russie et la Chine cherchent également à gagner une légitimité internationale en se positionnant comme des acteurs responsables et impartiaux sur la scène mondiale.
Perspectives futures
Vu sous l’angle des BRICS, dont la Chine et la Russie font partie, ce conflit va probablement ralentir l’avancée et l’expansion de leurs projets sans pour autant le stopper nette, surtout dans l’entrée de nouveau pays comme l’Arabie Saoudite ou encore l’Algérie.
L’Inde a quant à elle exprimé un fort soutien à Israël mais davantage dans le but de manipuler sa politique intérieure. C’est une façon pour le gouvernement en place d’identifier l’opposition indienne et la minorité musulmane à des soutiens du “terrorisme”, quitte à propager la désinformation la plus grossière.
Un autre élément à garder en tête est que les États-Unis ont décidé d’envoyer 2 portes avions face à Israël. Ce mouvement militaire, loin d’être anodin, va d’autant plus motiver le mouvement des BRICS. De plus en plus, les actes des occidentaux sont vus comme une sorte de néocolonialisme dans cette région du monde qui, de surcroît, ne résolvent rien.
Le soutien indéfectible des États-Unis à Israël va paradoxalement renforcer les nations des BRICS et les pays voulant rejoindre ce groupe. La Russie et la Chine en tireront un avantage certain. Cela marquera plus clairement leur démarcation de la politique extérieure occidentale et poussera de nouvelles nations à rejoindre leur mouvement.
Conclusion
La crise israélo-palestinienne met en lumière une divergence croissante entre les puissances orientales et occidentales sur la scène internationale. Ce positionnement stratégique permet à la Russie et à la Chine de tirer leur épingle du jeu, en mettant en avant leur volonté de médiation et leur engagement envers une solution équitable.
Par leur approche, ces deux nations cherchent non seulement à étendre leur influence dans une région clé, mais aussi à se positionner comme des acteurs internationaux responsables et impartiaux. Ils démontrent ainsi une alternative à l’approche occidentale.
Cette divergence d’approches entre l’Est et l’Ouest, manifeste dans le conflit israélo-palestinien, reflète des dynamiques géopolitiques plus larges et souligne la montée en puissance de la Russie et de la Chine sur la scène internationale.
Elle suggère également une recomposition potentielle des alliances et des médiations internationales dans la résolution des conflits futurs au Proche-Orient.