Le 11 décembre à 22h, Dimitri de Kochko est l’invité de l’émission Un Soir avec Lara, animée par Lara Stam, sur Géopolitique Profonde.
Dimitri de Kochko est journaliste, réalisateur et militant associatif. Il est un acteur incontournable des relations franco-russes. Président de Stop Russophobie et fondateur de l’association France-Oural, il est également à l’origine de plusieurs initiatives culturelles majeures, comme le Prix Russophonie et les Journées du Livre Russe. Son expertise sur la Russie et ses implications géopolitiques sera précieuse pour décrypter le récent désengagement de Moscou en Syrie.
Poutine tourne le dos à la Syrie : une stratégie calculée
Le retrait de Vladimir Poutine de Syrie marque un tournant majeur dans l’équilibre des forces au Moyen-Orient. Après plus d’une décennie de soutien sans faille au régime de Bachar el-Assad, Moscou change de cap pour des raisons à la fois géopolitiques, économiques et stratégiques.
Cette décision rentre dans le cadre d’une redéfinition des priorités russes dans un contexte de tensions globales croissantes.
La Russie réoriente ses priorités vers l’Ukraine et l’Asie
La guerre en Ukraine mobilise désormais toutes les ressources militaires et diplomatiques de la Russie. L’“opération militaire spéciale”, lancée en février 2022, a transformé la géopolitique mondiale en plaçant Moscou au centre d’un bras de fer avec l’Occident. Ce conflit, que Vladimir Poutine considère comme existentiel pour l’avenir de la Russie, absorbe non seulement des ressources humaines et matérielles colossales, mais impose également une réorganisation complète des priorités stratégiques du Kremlin.
Dans ce contexte, la Syrie, théâtre d’une guerre civile depuis 2011, ne représente plus un intérêt stratégique immédiat pour Moscou. Bien qu’elle ait servi à démontrer la puissance militaire russe à travers son soutien en 2015 contre daesh et les forces rebelles anti-Assad, les choses ont depuis changé.
En parallèle, le pivot vers l’Asie, amorcé dès les années 2010, s’intensifie. La Russie cherche à renforcer ses alliances avec des puissances montantes comme la Chine, l’Inde ou encore l’Iran, capables de contrer l’influence occidentale. Pour Moscou, maintenir une présence coûteuse en Syrie, sans véritable retour sur investissement, devient un luxe incompatible avec ses objectifs stratégiques.
Une lassitude face à Bachar el-Assad
Malgré le soutien de la Russie, le régime de Bachar el-Assad n’a jamais su capitaliser sur les victoires militaires obtenues grâce à l’intervention russe. L’économie syrienne était en ruine, son armée faible, et le pays profondément fragmenté. Une grande partie du territoire syrien demeurait hors du contrôle d’Assad, notamment dans le Nord, où la Turquie et les forces kurdes continuaient d’affirmer leur présence.
Par ailleurs, Israël multipliait les frappes aériennes pour contrer l’influence de l’Iran sur le terrain, un partenaire clé de Damas.
L’armée russe, présente depuis près d’une décennie, a dû faire face à un épuisement logistique et militaire en Syrie. De plus, Bachar el-Assad a déçu les attentes russes en ne parvenant pas à stabiliser durablement son pouvoir. Ces faiblesses structurelles on renforcé l’idée que la Syrie est désormais un poids mort dans la stratégie russe.
Poutine, pragmatique, opte alors pour un désengagement progressif, tout en conservant certains leviers d’influence symboliques, notamment la base militaire de Tartous, essentielle pour l’accès russe à la Méditerranée.
Les conséquences régionales et globales
L’abandon progressif de la Syrie par la Russie laisse un vide géopolitique que d’autres puissances régionales s’empressent de combler. Israël et la Turquie commencent déjà à intensifier leur présence en Syrie pour remplir l’espace laissé vacant. Cette dynamique renforce l’instabilité du Moyen-Orient, tout en offrant à Washington une opportunité de renforcer son influence dans une région où elle perdait du terrain.
Pour la Russie, ce choix n’est pas sans risques. Bien qu’elle allège son implication dans un conflit périphérique, elle pourrait perdre une partie de son influence au Moyen-Orient, une région stratégique pour sa politique énergétique et militaire. Cependant, Poutine semble considérer que le jeu n’en vaut plus la chandelle.
Les forces terroristes qui se sont emparées du pouvoir en Syrie, Hayat Tahrir al-Cham (HTS), sont de la même engeance qu’al-Qaïda, al-Nosra et Daesh. Elle sont financées et induites par les mêmes forces qui ont provoqué la guerre en Ukraine.
Le Kremlin mise sur un repositionnement global, concentrant ses efforts sur ses intérêts vitaux en Ukraine et sur des alliances solides en Asie, dans l’objectif de bâtir un monde multipolaire capable de résister à l’hégémonie américaine et à ses ingérences.
Était-ce le meilleur choix à faire de la part du Kremlin ou de Téhéran ? Il semblent qu’ils aient évité le piège tendu par l’axe Washington/Tel Aviv/Ankara/Kiev.
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