🔥 Les essentiels de cette actualité
- Israël frappe la Syrie, prétendant riposter à des tirs, mais vise à contrôler l’agenda sécuritaire au Moyen-Orient. Logique du chaos derrière le vernis diplomatique.
- Le ministre Katz accuse sans preuve le président syrien par intérim. Israël agit vite, frappe fort, impose sa lecture des événements.
- La Syrie dénonce un bouc émissaire. Israël maintient une présence militaire active pour neutraliser toute réorganisation syrienne.
- Stratégie israélienne d’instabilité permanente pour marginaliser toute alternative diplomatique au Moyen-Orient.
Israël a frappé la Syrie le 3 juin, pour la première fois depuis près d’un mois. Officiellement, il s’agit d’une riposte à deux projectiles tombés sur son sol.
Mais cette attaque s’inscrit dans une logique bien plus large, faite d’intimidation militaire, de calculs géopolitiques et d’une volonté manifeste de contrôler l’agenda sécuritaire au Moyen-Orient.
Derrière le vernis diplomatique, c’est une fois de plus la logique du chaos qui prévaut.
Une « réponse » à géométrie variable
Le ministre israélien de la Défense, Israël Katz, n’a pas tardé à désigner le responsable : le président syrien par intérim Ahmed al-Sharaa. Ce dernier est accusé sans preuve d’avoir organisé les tirs depuis la Syrie. Le ton est direct, sans nuance, sans investigation préalable.
« Nous considérons le régime syrien directement responsable de toute menace et de tout tir contre Israël », a déclaré Katz.
Une déclaration qui en dit long. Peu importe que les projectiles soient tombés dans des zones ouvertes, sans faire de victime. Peu importe que la Syrie affirme ne pas être impliquée, pointant du doigt des acteurs non étatiques et des groupes résiduels de l’ère Assad, proches de l’Iran.
La stratégie israélienne ne consiste pas à attendre des preuves, mais à agir vite, frapper fort, puis imposer sa lecture des événements.
La Syrie : bouc émissaire pratique d’un désordre entretenu
Le ministère syrien des Affaires étrangères souligne quant à lui qu’il est trop tôt pour déterminer l’origine exacte des tirs.
« Il existe de nombreuses parties qui pourraient chercher à déstabiliser la région pour servir leurs propres intérêts », a déclaré le ministère.
Parmi elles, les restes des milices pro-iraniennes ou encore le groupe peu connu des « Brigades du martyr Muhammad Deif », qui aurait revendiqué l’attaque. Mais cette revendication, comme souvent dans ce type de contexte, n’a pas pu être vérifiée de manière indépendante.
Qu’importe. Pour Israël, la priorité est ailleurs : maintenir une présence militaire active dans le sud syrien, et neutraliser tout embryon de réorganisation de l’État syrien sur ses frontières.
Le spectre de l’Iran toujours convoqué
Depuis plus d’une décennie, Israël justifie ses frappes en Syrie par la lutte contre l’influence iranienne. Un argument efficace pour obtenir l’appui de Washington, pour gagner l’opinion publique occidentale, et pour entretenir une logique d’exception géopolitique.
Ce narratif a été consolidé par la guerre civile syrienne, durant laquelle Israël a régulièrement bombardé des convois, des dépôts d’armes, des bases liées au Hezbollah ou aux Gardiens de la Révolution. La réalité ? Un pouvoir israélien qui prend acte de l’affaiblissement syrien pour imposer sa suprématie militaire sur le front nord.
De Wadi Yarmouk à Quneitra : des cibles stratégiques mais civiles
Les frappes récentes ont ciblé des zones rurales, notamment autour de Wadi Yarmouk, Izraa et Deraa. Des témoins parlent d’incursions israéliennes répétées, d’habitants empêchés de cultiver leurs terres, de fermes détruites.
Le gouvernement syrien parle de « pertes humaines et matérielles importantes ». Derrière cette formule, ce sont des familles, des terres agricoles et des communautés déjà précarisées qui sont frappées de plein fouet, au nom d’intérêts régionaux qui ne les protègent jamais.
Golan occupé, ambitions assumées
Il faut rappeler que depuis la guerre de 1967, Israël occupe illégalement le plateau du Golan. Une occupation entérinée de facto par les États-Unis sous l’administration Trump, qui a reconnu cette annexion en 2019. Une violation manifeste du droit international.
Dans cette zone stratégique, Israël mène une politique de peuplement, militarise le territoire et repousse toute tentative de retour de l’autorité syrienne. Et à la moindre tension, Tel Aviv bombarde.
L’interventionnisme israélien : ni nouveau ni ponctuel
Ce nouvel épisode s’inscrit dans un calendrier de frappes régulières. Depuis le début de l’année, Israël a mené plus d’une dizaine de frappes en territoire syrien.
Le but ? Empêcher toute consolidation d’un pouvoir syrien, éviter le retour de milices chiites contrôlées par l’Iran, et surtout préserver un équilibre militaire où Israël reste maître du tempo.
Derrière chaque missile tiré, c’est une volonté claire : celle d’imposer par la force une vision régionale unilatérale, en marginalisant toute alternative, y compris diplomatique.
Et les Américains dans tout ça ?
Ironie de l’actualité : cette attaque intervient alors que le nouvel émissaire américain pour la Syrie affirmait récemment croire en la « faisabilité » d’un processus de paix entre Tel Aviv et Damas.
Une paix, vraiment ? Alors que l’État israélien bombarde, occupe et criminalise tout rapprochement avec les autorités syriennes ?
Ce double langage occidental n’étonnera personne. Il est le même que celui qu’on retrouve à Gaza, en Cisjordanie, ou encore au Liban.
Le front yéménite s’invite au conflit
Comme si la situation n’était pas assez explosive, les Houthis du Yémen ont revendiqué l’envoi d’un missile balistique vers Jaffa, en soutien aux Palestiniens. L’armée israélienne affirme avoir intercepté le projectile.
Cette extension du conflit à l’échelle régionale montre que les actions d’Israël ont des répercussions bien au-delà de ses frontières immédiates. Et que chaque frappe contribue à élargir le cercle des tensions.
Une dynamique d’instabilité permanente
Ce que révèle cette nouvelle frappe, ce n’est pas seulement l’agressivité militaire israélienne. C’est une stratégie plus large : maintenir le Moyen-Orient dans un état d’instabilité chronique, où les alliances sont floues, les responsabilités diluées, et la souveraineté des États systématiquement remise en cause.
Tant que cette dynamique perdure, ni la Syrie, ni le Liban, ni la Palestine ne pourront envisager de reconstruction durable.
Une frappe de trop dans un engrenage sans fin
L’attaque israélienne contre la Syrie n’est pas un acte de défense. C’est un acte d’ingérence. Un signal envoyé au monde arabe : Israël frappe où bon lui semble, sans opposition sérieuse, et avec l’assurance d’une impunité internationale.
Tant que la communauté internationale fermera les yeux, et tant que certaines élites occidentales continueront à couvrir ces manœuvres au nom d’un “droit à la sécurité” à géométrie variable, le Proche-Orient restera une poudrière.
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